JC Lattès (2022), Livre de Poche (2023)
Paternité × Survie × Quête de soi × Identité
Imaginez-vous tout perdre. Vraiment, imaginez-vous tout perdre… ? Ian a tout perdu. Enfin il le pense…
Il était parti traquer le loup qui rôdait autour de cette cabane qu’il avait bâti, loin dans sa montagne, reculée des Hommes, il en est revenu bredouille. Et avant même d’apercevoir les poutres en bois qui dessinaient son foyer, il l’a senti. Quelque chose n’allait pas.
Son fils n’est pas venu vers lui, courant à travers champs pour se jeter dans les bras de son père comme il le faisait à chaque fois que celui-ci s’absentait. Même les rayons du soleil ne se dispersaient pas dans cette couleur qui illuminait la prairie alentour. Non. Juste le silence, l’angoisse, et la peur qui tenaille comme un étau, puis se transforme en terreur quand il découvre, allongé devant la cabane, le corps inerte de sa femme, Ava. Il était parti traquer le loup, et c’est un ours qui lui a tout pris. Tout était perdu… Enfin, le pensait-il.
Car sous le corps, un autre est resté en vie, protégé par ce bouclier maternel qui depuis la première cellule qui se divise pour devenir embryon, fait rempart face aux dangers de la vie. Son fils vit encore. Grâce au courage d’Ava, Aru, vit encore. Cet enfant, ça avait été le souhait de sa femme, ce bout de vie qui rythmerait le quotidien difficile d’une vie en autonomie dans cette montagne loin des Hommes. Une vie taillée pour Ian. Une vie qu’il avait décidé pour sa famille, et dans laquelle l’amour de sa femme lui permettait de tenir. Sa femme n’est plus là, Aru oui.
Mais…
“Un enfant ce n’est pas fait pour la vie, cette vie-là je veux dire qui est immense et brutale devant lui devant nous…”
Dans ce fabuleux récit écrit comme un journal intime, Sandrine Collette plonge sa plume dans les profondeurs de la psychologie humaine. Oui.
N’ayons pas peur des mots face à la force de ceux qu’elle utilise. L’écriture directe, brute, parfois violente, n’en reste pas moins d’une beauté à couper le souffle tant dans la description du dehors, que du dedans. Car c’est de cela qu’il s’agit. Un texte qui vous amènera dans la réalité de ce que c’est qu’être un compagnon, un père, un homme. Dans ce qu’il y a de plus déroutant à voir que de la faiblesse de l’enfant, née toute la force du père. Et que de la force de l’enfant, se révèle toute la faiblesse du père.
Dans cette quête de soi, Sandrine Collette donne force à tous ses personnages en brossant les traits d’une relation qui n’est pas acquise, d’une relation qui se construit à travers chaque épreuve, chaque péripétie. Ian pensait avoir tout perdu, et c’est quand il aura été au bord de l’abîme, qu’il se rendra compte qu’il lui restait en fait tout à gagner. Car l’amour d’un proche, d’un enfant, d’un fils, n’est pas donné, il se gagne. Et celui d’un proche, d’un parent, d’un père, bien qu’inné peut rester fragile.
“ Si sa main trouve ma main elle se serre autour […] et je me dis – Les choses sont à leur place je crois. ”
Suivez donc à travers ce roman comment une identité se développe, celle de l’amour. Suivez comment un geste irréfléchi, un danger qui rôde, viennent lever brique par brique le pont qui relie deux âmes.
J’ai lu cet ouvrage quelques mois avant de moi-même devenir père. J’en suis ressorti bouleversé. Et convaincu : l’amour, quel qu’il soit – pour une femme, un ami, un parent, un proche, un enfant – né des épreuves qui le renforcent, mais surtout de ces petits moments qui en font son essence. Ces moments où un rien devient un Tout, ces moments que Sandrine Collette arrive à transmettre dans un style où même la ponctuation guide un rythme réflexif, et où l’émotion et la beauté jaillissent des scènes d’action et de contemplation en cascade.
C’est un livre cinq étoiles. Un livre qui ne laissera et ne peut laisser personne indifférent. Peu importe l’amour que l’on a à donner, Sandrine Collette nous rappelle dans On était des loups, l’importance qu’il y a à le donner pour survivre face à cette Nature et cette Humanité, écrasantes de tragédies.
“ Je ne sais pas ce que ça vaut dans mon état mais il m’a sauvé la vie en tout cas ce qu’il en reste. ”
MALIK


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