Dargaud, 2024
BD × CONTE × CLASSIQUE REVISITé
Qui ne connaît pas l’histoire de Peter Pan ? Sans avoir forcément lu l’œuvre originale de James Barrie, on a tous en tête des images du dessin animé Disney ou du cultissime film Hook avec Robin Williams !
Alors quand j’ai vu cette sublime couverture au rayon BD, j’ai été intriguée. Une énième réécriture de Peter Pan, qu’est-ce que ça peut donner ? Puis j’ai lu les premières pages, une sorte de préface qui contextualise l’ouvrage et la démarche de José-Luis Munuera, et j’ai été convaincue.
On y apprend que le personnage de Peter Pan n’est pas né au sein du roman éponyme, connu et traduit à travers le monde. Sa première apparition dans une œuvre de Barrie remonte à des années plus tôt… Mais alors, qui est Peter Pan ? Quelles sont les origines de ce personnage iconique ?
La préface précise bien au lecteur que la BD de Munuera est une “très libre adaptation, à partir d’un matériau fragmenté, extrêmement vaporeux, pour ne pas dire ectoplasmique”. En s’appuyant sur divers écrits de Barrie, Munuera délivre un très bel hommage au célèbre enfant qui ne voulait pas grandir…
“Le seul souci avec les enfants, c’est qu’ils finissent par grandir. Tôt ou tard, ils deviennent tous des humains.”
Il n’y a pas que le Pays Imaginaire, il y aussi les jardins de Kensington, au cœur de Londres. Dans la BD, c’est ici que vit Peter Pan et toutes sortes de créatures magiques, pas forcément commodes. Ce petit monde prend vie à la nuit tombée, quand tous les humains ont déserté les lieux. Sauf que la jeune Maimie Mannering s’est égarée… Sa rencontre avec Peter marque le début d’une nuit mouvementée !
Et oui, avant Wendy, il y a eu Maimie. Une petite fille courageuse qui manque de se faire dévorer par des fées affamées. On a aussi des arbres orgueilleux et des ombres menaçantes. Aucune trace des garçons perdus ou des pirates, à part quelques mentions pour le clin d’œil. C’est comme lire une toute autre histoire, et c’est rafraîchissant, on se demande quelle direction va prendre l’intrigue !
Le lecteur est tenu en haleine par les deux grands enjeux de nos protagonistes : sortir Maimie de Kensington, et découvrir l’identité de Peter. Car la question qui revient le plus souvent n’est pas qui est Peter, mais qu’est-ce que Peter ?
“Peter n’est ni ceci, ni cela. Il n’est ni ici, ni là. C’est un entre-les-deux, ni un oiseau, ni un enfant. Même s’il vole comme un oiseau et se comporte comme un enfant.”
J’ai lu le roman de Barrie il y a longtemps, quand j’étais adolescente, et si je ne m’en souviens que très peu, il me semble que mon avis était en demi-teinte. C’était une sorte de démystification d’une figure que j’affectionnais beaucoup, et je n’étais peut-être pas assez mature pour comprendre le personnage, les messages derrière l’histoire, toutes les thématiques abordées par Barrie. Après cette BD, je suis curieuse de redécouvrir le roman avec un nouvel œil, un nouveau recul.
En termes de démystification, la BD de Munuera rentre aussi dans ce registre. On a une atmosphère assez sombre, inquiétante, accentuée par les couleurs froides et bleutées des planches. Comme je le mentionnais plus haut, certaines créatures sont carrément malveillantes. Peter se révèle impatient, esseulé, capricieux, égoïste. On est donc assez proche de l’œuvre originale de Barrie, loin des versions édulcorées qui ont vu le jour au fil des années.
En tout cas, on a là une très belle réécriture, avec des personnages attachants (gros coup de cœur pour le corbeau Salomon!) et une histoire touchante. J’ai été conquise par le coup de crayon de Munuera, ce qui m’a donné envie de découvrir ses autres œuvres (il a notamment adapté Dickens et Melville en BD).
Une superbe découverte, tant pour le dessin que pour le texte.
Marie


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